
YIM MALINE
Dessins
Yim Maline, artiste cambodgienne née à Battambang et établie à Siem Reap, s’exprime à l’aide de divers media : sculptures, installations, vidéo. C’est une série de dessins exécutés durant une résidence aux Etats-Unis en 2015 puis en Afrique du Sud en 2016 que la Galerie Lee a choisi de présenter au printemps 2017. La technique utilisée est plutôt classique (crayon et aquarelle sur papier), ce qui tranche avec les investigations que Yim affectionne : elle a laissé au soleil de grands cônes de papiers, elle a peint ou installé des plantes sur des morceaux de charbon et étudie aujourd’hui les possibilités du papier mâché. On retrouve toutefois dans cette série de papiers ses obsessions récurrentes : elle est attirée par les formes organiques, images d’une nature à la fois fantasmée et menacée. Son travail est habité par le sentiment d’une cohabitation entre une nature puissante, attirante (les étranges plantes, souvent vertes, de ces dessins), célébrée par l’imagination et sa disparition même, ici incarnée par ces formes au crayon gris (qui évoquent la cendre, la mort ?) et l’utilisation du fond blanc.
Au premier regard, on décèle un équilibre joyeux avec le déploiement de plantes, herbes ou arbres éclatants, qui rappelle les verts intenses des paysages cambodgiens en temps de mousson. L’équilibre, le mouvement et la joie que procure la contemplation sont soulignés par des compositions élaborées. Yim Maline jardine et adore la nature. Le potager qu’elle cultive tous les jours à Siem Reap prolonge celui de son enfance. Elle dessine et sculpte dans son jardin qui fait quasiment partie intégrante de son œuvre plastique. Au second regard, ses dessins et toute son œuvre incluent une forme de tension. L’équilibre entre les diverses parties peut se lire comme une lutte d’une nature sous pression qui cherche à délimiter son espace vital. Les parties grises semblent parfois l’envahir, le vide du fond blanc la happer. De plus, les fleurs ou bulbes sont bizarrement difformes, elles ne ressemblent à rien de connu.
Peut-on y voir les restes d’un éden perdu après une catastrophe ? Voilà ce que traduit l’oeuvre de Yim Maline : la mémoire d’une nature sublimée mais aussi la menace d’une catastrophe à venir ou la possibilité de survie après une destruction qui a eu lieu. Ces dessins montrent une recomposition après ou avant un événement tragique. Yim Maline ne parle pas directement du Cambodge dans son œuvre. Elle refuse d’ailleurs d’être circonscrite à son pays et de devoir se positionner par rapport à l’écrasant art angkorien. Toutefois les risques écologiques associés à de changements trop rapides, l’urbanisation à outrance et le manque de respect pour la nature, le souvenir d’une catastrophe passée, la préservation de ce qui est menacé ou qui renaît difficilement hantent une oeuvre résolument tournée vers la célébration de ce qui nous entoure mais que nous pouvons perdre irrémédiablement.
Yim Maline est née en 1982 à Battambang, Cambodge. Elle est diplômée de l’école d’art Phare Penlak Selpak et titulaire d’une licence de l’école de beaux arts de Caen. Elle a présenté plusieurs solo show à la galerie Sa Sa Bassac de Phnom Penh et a fait partie d’expositions de groupe, dont la Yavuz Gallery de Singapour en 2015. Elle a effectué des résidences d’artiste aux Etats-Unis en 2012 et 2015, en Andorre et en Afrique du Sud en 2016. Elle vit et travaille actuellement à Siem Reap.
Yves Zlotowski


EXPOSITION
du 6 au 29 avril 2017
Vernissage jeudi 6 avril > 18h - 21h